Création : 27 septembre 1988 au Festival Musica (Strasbourg)
Effectif : 1 à 6 percussionnistes
Dédicataires : Percussions de Strasbourg
Commanditaire : Ministère de la Culture et de la Communication
Editeur : Durand
Le Livre des Claviers comprend six pièces, relativement brèves, destinées aux divers jeux de claviers dans la percussion. Les techniques liées aux claviers se sont assez largement développées au cours du XX° siècle. Si l’on compare l’emploi du xylophone chez Debussy à celui que fait Messiaen, puis Boulez, on constate une véritable percée en avant, amenant celui-ci (marimba et xylomarimba compris) à un véritable rôle de soliste. Cependant, ces dernières années, des techniques à jeu continu avec quatre baguettes poussent encore plus loin les possibilités. Il ne s’agit pas de développer une technique, mais bien de réaliser des configurations musicales qui étaient encore impossibles il y a quelques années : la polyphonie, et la succession d’accords de natures différentes dans une certaine vitesse. Cela a grandement motivé mon choix pour les claviers. D’autre part, la construction de nouveaux instruments acoustiques comme les sixens m’ont permis d’aborder des cas de figures nouveaux en ce sens que la notion de hauteur n’est plus prédominante, ou plutôt, devient plus complexe.
Pièce 1 : 2 marimbas (2 joueurs par instruments), 2 x 3 gongs thaïlandais Etude sur un ostinato accentué de manière irrégulière. Des accords répartis suivant six critères de densité et de polarisations harmoniques, s’alternent suivant des périodicités irrégulières. Les gongs marquent les changement de configurations harmoniques.
Pièce II : Duo de marimbas (1 joueur par instrument) Vingt-six séquences composent cette pièce, allant de structures amorphes (simples glissandi) , en passant par des états intermédiaires (traits brisés mais directionnels) jusqu’à des séquences complètement polarisées autour du centre. J’ai privilégié dans cette musique, faite de points reliés par des lignes, un jeu « coulé » pouvant simuler un phrasé legato par la grande vitesse avec laquelle doivent être joués certains traits.
Pièce III : Sextuor de sixens Les instruments, n’étant pas accordés aux mêmes hauteurs, et d’ailleurs ne possédant pas de hauteurs précises (inharmonicité), c’est au niveau des mouvements mélodiques ( montant et descendant) et des configurations rythmiques que se créera, parfois l’unité. La polyrythmie et l’homorythmie sont les axes extrêmes de cette pièce jouant parfois sur les dégradés de rythmes (superposition de six couches dérivées les unes des autres, allant de la plus égale à la plus irrégulière).
Pièce IV : Solo de vibraphone Variation textuelle d’une structure de base, entrecoupée à plusieurs endroits par un élément virtuose et régulier. Outre les techniques à quatre baguettes, j’ai développé ici une technique qui consiste à étouffer avec la main certaines lames, tandis que d’autres résonnent encore. On peut ainsi conserver une stabilité harmonique autour de laquelle gravite des accords plus éphémères et créer ainsi une texture polyphonique.
Pièce V : 2 marimbas (2 joueurs par instruments), 2 x 3 gongs thaïlandais Amplification de la pièce I. Un même matériel de base (en vérité un canon) est vu sous des angles variés : instabilité ou stabilité harmonique, périodicités différentes. La réunion des deux joueurs (avec quatre baguettes) sur le même instrument permet d’avoir une densité harmonique extrêmement riche.
Pièce VI : Sextuor de sixens Plus complexe que la pièce III, cette dernière joue principalement sur la notion d’ »épaisseur du son » où un même son doublé à 2,4 ou 6 parties créera un effet de « retenue » sur l’accord des instruments. Des séquences homorythmiques, des états polyphoniques et des textures globales s’enrichissent sans cesse, passant de l’état le plus simple au plus complexe.
Philippe Manoury