Création : 11 juin 1991, Portugal, Lisbonne, Quinzièmes rencontres Gulbenkian de musique contemporaine, par l’Ensemble Modern, les Percussions de Strasbourg et l’Orchestre Gulbenkian, direction : Mark Foster et Emilio Pomarico
Commanditaire : Fondation Gulbenkian
Effectif : 6 percussionnistes
Durée : 56′
Édition : Ricordi, München, nº Sy. 3107
Dédicace : à Luis Pereira Leal
Quodlibet : un terme latin – littéralement : « ce que l’on veut » – qui désigne une forme musicale caractérisée par la liberté avec laquelle le compositeur peut intégrer et confronter – parfois avec humour – des matériaux hétéroclites de sources disparates. Le Quodlibet de la dernière des Variations Goldberg de Bach tisse ainsi dans sa texture deux chants populaires allemands.Dans Quodlibet, Emmanuel Nunes a travaillé avec des matériaux d’époques différentes, mais issus exclusivement de quatorze de ses propres œuvres. De plus, il n’existe ici aucun collage, et presque aucune citation : tous les matériaux ont été en quelque sorte dégagés de leur réalisation instrumentale première, pour être recomposés, retravaillés à partir de leur état brut. Pour reprendre une expression de Levi-Strauss que le compositeur a faite sienne, Quodlibet procède de multiples va-et-vient entre « le cru et le cuit ». À tel point qu’il est sans doute impossible, à l’audition, d’établir une quelconque relation aux œuvres-sources. Et tel n’était certainement pas le projet. En effet, Quodlibet est peut-être avant tout une pièce où s’écrit l’espace. La partition a été conçue pour le Coliseu dos Recreios de Lisbonne – un lieu chargé de résonances et de souvenirs : dès son enfance, Nunes y assistait aux spectacles les plus divers – depuis le cirque, la gymnastique, la zarzuela et les opérettes jusqu’aux concerts de musique classique pour lesquels l’enceinte aux imposantes proportions accueillait les plus grands interprètes.Un espace sur lequel le compositeur a effectué un véritable travail de reconnaissance préalable, chronomètre en main, pour mesurer les temps de déplacement de tel point à tel autre, dans les galeries ou dans les tribunes. Car la partition prévoit, outre l’orchestre et les sept musiciens disposés sur la scène, vingt-et-un instrumentistes mobiles dispersés dans les étages. La figure 1 reproduit le plan du Coliseu, où le compositeur a indiqué les positions que viennent occuper ces interprètes voyageurs.